33 Marathons commencés, 30 terminés. Paris sera le dernier et le 31ème. A J-5, la préparation mentale prend tout son sens. Je partage avec vous ici mes « petits secrets » de coureuse longue distance. Et en particulier les 3 axes de ma préparation mentale pour dimanche.

Dans la course, il y a 3 acteurs en interdépendance complète : la tête, le corps, et le parcours !

Commençons par la tête.

C’est elle, cette bourrique, qui a pris la décision, il y a un an au lendemain de Paris 2016 de se réinscrire. Le premier marathon était à Paris en 1993. Celui-ci sera le dernier. Et tant qu’à faire autant limiter les frais, j’ai pu obtenir un dossard à 80 euros. Mais l’économie n’est pas la raison de la décision. Boucler la boucle, refaire Paris, clôturer à Paris cette expérience commencée à Paris en 1993. 13ème Paris en 2017. Bref la tête a décidé alors que les « papattes » avaient encore des courbatures !!!

Sur site, ce sera elle qui sera aux commandes, la tête. Elle devra décider d’être sourde… sourde à ceux qui diront « mais tu ne t’es pas assez entrainée… » sourde aux râleurs, sourde aux négatifs, sourde tout court pour ne se concentrer que sur l’essentiel : bien dormir les deux jours avant, bien manger la veille, avancer pas à pas, regarder devant, faire le vide, ne se concentrer que sur une chose, la ligne bleue.

Sur site encore, elle devra savoir compter. Et là mes amis, je me connais et mon comptage est mobilisateur.

  • Dans 2 kil, je serai sous les 40,
  • Dans 10 de plus j’aurais fait un quart et je serai sous les 30.
  • Au bout de 2 heures, j’aurai presque fait la moitié…
  • 2 heures et 30 minutes, il restera moins de la moitié.
  • Au 25ème kil, il me reste une sortie d’entrainement
  • 3 heures, je ne pourrai plus abandonner….
  • Au 30eme, une petite sortie.
  • Au 35, une balade matinale avec Fize (ma chienne, ma fidèle complice d’entrainement !)…
  • Au 40, tu l’as fait, profite, dans 2 c’est trop tard, ce sera fini.
  • Les 195 derniers, je vais pleurer…

Vous l’aurez compris, gérer la distance, c’est pensez positif à chaque pas et ne pas envisager à 8h55, les 42 km. Le comptage efficace varie entre distance et temps, et focalise sur le plus facile en termes de perception.

Dans ma tête, il y aura aussi les copains… Ceux avec qui nous avons partagé les Km, les larmes de bonheur et de rage, les encouragements, les podiums et les abandons, les raids et les « raides » ! Ils seront là à chaque km, Ray, Claire, Régis, Sylvain. Et mon Hom bien sûr. Et mes chiens !

Le parcours maintenant.

12 Marathons de Paris à mon actif comme coureuse et je pense au moins 5 comme accompagnatrice sur une portion, souvent la portion finale. Connaitre le parcours, c’est gérer sa vigilance : la descente du départ : ne pas se laisser embarquer. Les pavés de Bercy, poser ses pieds correctement, surtout le gauche coutumier d’un Morton depuis longtemps. Les biroutes et barrières du bois de Vincennes, ne pas se cogner. Le tunnel des voies sur Berges : ne pas chanter, respirer, s’économiser : rester dans sa bulle. Les ponts de la voie Pompidou : descendre et monter tranquille. Le faux plat du 16ème arrondissement, garder la foulée rasante, la fatigue se fait sentir, on a passé le 32ème. Roland Garros, attention aux pavés. On repart vers le bois de Boulogne : d’abord regarder devant, pas sur les côtés. A droite il y aura ceux qui sont devant. Puis au retour, regarder sur les côtés ceux qui sont derrière. Le 39ème souvent pas visible… mais on arrive. La grande place Dauphine. Au centre le mur avec la fameuse citation de Tassigny : « ne pas céder » aucun coureur ne la voit. Elle est pourtant là en gros. Raser le centre mais sans lutter avec les coureurs. Se mettre dans l’alignement de l’avenue Foch… Pourquoi se mettre dans l’alignement ? Pour voir l’arche plus tôt et pour profiter à fond de ces 200 derniers mètres. Ecouter ses pas… Profiter. Dans 200 mètres, c’est fini. En 1993, je faisais cette expérience pour la première fois…Je ne l’ai jamais oubliée.

Et le BO-DY !

Et enfin la préparation mentale du corps. Écouter, sentir, mobiliser. Que disent les ischios, mes chers ischios qui m’en ont fait voir pendant 5 ans… Ils disent sensibilité 0.5 / 10. Que disent les articulations : 0/10, tout est nickel. Le dos, variable entre 0.5 et 1/10. Bref, les « anxiomètres » sont au plus bas et c’est tant mieux.

Se programmer la tête à ressentir le corps :

  • km 1, souffler, respirer placer ses pieds. Se programmer dans la descente.
  • Km 5 : échauffement terminé, rythmer la respiration, placer ses genoux, vérifier la vitesse de défilement du sol. Ravitailler sans se battre. Reprendre la route.
  • Km 10 : vérifier la montre. Ne pas accélérer brutalement en cas de retard. Ajouter 2 cm à la foulée, cela suffit.
  • Km 15, vérifier les pulses. Pense à ses hanches, placer les genoux, garder un pas antérieur.
  • Km 20, placer les bras, les premiers symptômes de fatigue apparaissent. Les garder le long du buste. Mobiliser chaque élément du corps dans le sens de la marche et pas en travers (On appelle cela l’énergie cinétique !!!). Détendre la nuque.
  • Km 25, attention, détendre les épaules, revisiter son corps vite fait en partant de la nuque et en descendant jusque dans les pieds et donner 2 cm de plus à chaque foulée… ils ont été perdus depuis la dernière fois. Juste 2cm de plus à chaque foulée. Détendre les bras.
  • Km 30, regarder devant et se concentrer, commencer le compte à rebours. Détendre le cou, et laisser la langue tomber au fond de sa bouche. Visiter son corps de haut en bas sans oublier le ventre. Se concentrer quelques secondes sur ses abdos et les intercostaux avant de poursuivre la descente vers les cuisses et les mollets. Placer ses pieds. Rester vigilante.
  • Km 35, ravitaillement, rester sur son rythme. Le piège : perdre sa lucidité, paniquer de ne pas pouvoir ravitailler. Paris est très bien fait : regarder devant, ravitailler loin. Prendre juste quelques gouttes, limiter ses gestes. Placer ses jambes dans l’axe. Compter les foulées en rythme. Se concentrer sur chaque km. Placer ses pieds, genoux, hanches, abdos, épaules, nuque, bras, garder le mouvement des bras. Ils sont essentiels et peuvent donner l’élan qui manque.

La suite… vous la connaissez : km 40. Se dire que c’est fini. Profiter, profiter, profiter…

La médaille autour du cou, marcher, souffler et saisir chaque seconde de ce corridor de sourires et de larmes, de crampes et de joies…

Bref, il n’est plus temps de courir, évidemment, il est temps de se préparer dans la tête. Et jeudi, récupération du dossard. Mise dans l’ambiance. Quel bonheur !

Muriel Jouas

Coach sportif, médiateur, formateur

13 Parismarathon, 31 marathons terminés avec celui-ci !!!

 

 

 

 

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